Le mexicain. Bien. Avant toute chose, petit préambule en forme d’avertissement sans frais, à destination des jeunes et des imbéciles qui nous regardent, et je ne le répéterai pas deux fois, bande de mollusques confortablement assis sur vos certitudes et votre sous-culture répugnante: le premier qui commence à chanter «un mexicain basané» ou «sous le soleil de Mexico» prend une tortilla dans la cabesa.
La capitale du Mexique est appelé Mexico, tout comme la capitale du Brésil est Brasilia, la capitale de l’Algérie, Alger, et la capitale du Laos… Ventiane. Merci. Y’en a deux qui suivent. Le mexicain est appelé mexicain pour pas qu’on ne le confonde avec le chilien, qui habite au Chili, alors que le mexicain, lui, comme son nom l’indique, habite en Californie du Sud. Chaque année, ils sont encore des dizaines de milliers à traverser le Rio Grande à la nage en se prenant pour John Wayne, sans se douter que de l’autre côté de la frontière, l’herbe n’est pas forcément plus verte, elle est surtout plus loin.
Cela n’empêche pas qu’il faut tout de même un grand courage pour traverser le Rio Grande à la nage en plein milieu de la nuit, surtout avec ces immondes slips de bains moules-bites qui étaient tellement à la mode l’été dernier dans les piscines branchées de Mexico. Mais là n’est pas la question. Malgré sa petite taille et son énorme capacité à s’enfermer à double tour chez lui au premier verre de tequila brisé sur le comptoir du saloon, il n’en reste pas moins que le Mexicain est un garçon très courageux, même s’il reste dans l’ombre. C’est d’ailleurs pour cela que l’on peut aussi l’appeler un sombre héros.
Les mexicains sont par ailleurs des gens charmants qui, à l’inverse de leurs cousins hispaniques, ne tuent des vaches que pour manger et ne liquident des touristes étrangers en goguette qu’à l’aide d’une machette, c’est plus sportif. Au moment même où il découpe la première phalange du petit doigt qui sera envoyé à la famille de l’otage, le mexicain crie spontanément « Viva Zapata », en hommage au grand chef de guerre local. Zapata, mercenaire cruel et sans foi ni loi, était aussi sacré rigolo qui, lorsqu’il n’avait pas tranche de citron verte dans sa tequila, était capable d’en faire tout un cirque. Oui, le cirque Zapata. C’est toujours les deux mêmes qui suivent. Ah, Zapata, ce grand homme, ce grand comique dont l’occupation favorite était de sodomiser des petites mexicaines de douze ans et demi...
Vous pourriez penser que l’histoire mexicaine s’en est trouvée bien noircie, mais les chicanos n’en étaient pas à leur premières mésaventures de leur histoire : en 1963, ils avaient déjà connu une période trouble lorsqu’ils subirent une attaque totalement lâche et imprévisible d’une armada de Malabars homosexuels en tee-shirts jaunes pétants. Bilan : 6.000 morts étouffés par le bubble-gum avarié, une histoire bien entendue étouffée par l’intelligentsia politique du pays. Depuis ce jour funeste, le mexicain moyen (environ 1m63 si l’on en croit les récents sondages) ne peut s’empêcher de retenir ce cri puissant à chaque coup du sort qui s’abat sur le pays : Carambar ! Je comprends leur désarroi, moi-même ayant vécu l’attaque insoupçonné d’une armée de bics oranges à double-lames, sans merci. Depuis, je suis en procès avec Gilette, mais ce n’est pas votre problème. Reprenons.
Malgré ces épisodes troubles, il fait bon vivre au Mexique, d’autant que les connaisseurs semblent unanimes pour déclarer que la mexicaine est une très belle plante carnivore. Personnellement, je dois vous avouer que le port simultané du poncho, du sombrero et de la moustache à la Zapata, ça ne Mexique pas plus que ça.
dimanche 26 juillet 2009
La véritable histoire vraie de Freddy Siroco (2)
D’un geste autoritaire de la main droite, Tacata Bash congédia brusquement la servante qui ne cessait de traîner bruyamment des pieds dans son dos, et fusilla du regard la capitaine de la garde qui se présentait, copieusement essoufflée, dans l’encadrement de la porte. Sans discuter, elle opina du chef, lui adressa une sorte de bref salut militaire en portant la main à son sein droit, et tourna les talons immédiatement en refermant sur elle avec un grincement déchirant la lourde porte boisée.
Lorsqu’elle entendit le cliquetis du pêne dans la serrure, Tacata Bash se détendit soudainement, soupira, entrouvit légèrement les cuisses pour laisser entrevoir quelques centimètres carrés de peau dont se dégageait une douce odeur de jasmin, et d’une petite flatterie sur la nuque de son compagnon, l’invita à plonger la tête toute entière dans l’échancrure. C’était là encore un de ses rares privilèges royaux, et elle n’était pas prêt de l’abandonner à ses courtisanes, quand bien même elles passaient leurs journées à se languir en glissant à son amant des regards entendus, emplis d’une sauvage concupiscence.Tacata pouvait sentir dans son dos leurs yeux brûlants de cette étrange fièvre, lui transperçant l’omoplate d’une jalousie qu’elles ne cherchaient même plus à contenir, dévorant sur place l’Homme, son homme, avec une voracité sans pareil.Elles pouvaient toujours courir, jamais leurs mains besogneuses d’ouvrières mal dégrossies ne viendront parcourir les lignes parfaites du torse de Frédéric Sirocovitch. Elles n’en auraient jamais l’occasion, et surtout, elles n’en auraient jamais le droit. Dans les heures sombres qui avaient suivi la nuit torride de la Grande Epuration, les Sœurs Constituantes s’étaient juré de ne plus jamais faire commerce de leur charme et de proscrire totalement le plaisir charnel avec tout membre de la caste inférieure. L’immense majorité d’entre eux avaient péris dès les premiers temps de la révolution, et les quelques rescapés qui avaient réussi à s’enfuir dans les montagnes de Gaïa n’avaient eu une espérance de vie que très limitée, mais elles avaient tout de même tenu à faire graver leur serment dans la pierre noble qui ornait la salle du trône, juste au-dessus de la tête de Tacata. A l’époque, elle n’était encore qu’une enfant, une toute jeune pousse de treize printemps que l’on promettait déjà à un grand avenir et à qui l’on avait offert pour son quatorzième anniversaire l’un des derniers représentants de la race maudite, en guise d’animal de compagnie.
Dans les premiers temps, c’est bien ainsi qu’elle le traita. Rien ne l’amusait plus que de lui arracher à pleine main des touffes de cheveux entières, et de fouetter ses mollets vigoureux avec une brassée de joncs jusqu’à ce qu’il saigne abondamment, s’amusant de le voir lécher ses blessures dans un coin de la pièce, s’esclaffant de rire à chaque fois qu’il tentait de détaller sur quelques mètres avant que la lourde chaîne qu’il portait autour du cou ne le rejette violemment en arrière comme un fétu de paille. Et puis, elle s’était lassé de ses jeux d’enfants, le voir courir après une balle ne l’amusait plus autant, et la cruautés des premiers jours fit place peu à peu à des émois intestinaux dont elle avait mis bien du temps à comprendre l’origine. C’était comme si elle ne pouvait s’empêcher de faire courir ses doigts sur la peau bronzée de l’Homme, comme si elle se blottissait malgré elle entre ses bras musclés pour y chercher un peu de chaleur et de douceur pour contrer la brutalité de son éducation quotidienne, faite de haine et d’autorité. Elle savait bien pourtant qu’il était le mal incarné, l’ennemi intime contre qui s’était battu avec tant de férocité sa mère et ses tantes pour que elle, Tacata Bash, puisse jouir d’une vie plus correcte et radicalement différente de celles que ses ancêtres avaient vécues. Mais quel mal pouvait-il y avoir à laisser Freddy fouiller son intimité de ses doigts habiles et fourrer sa langue à un endroit auquel elle-même n’avaient pas accès. Après tout, toutes les femmes du royaume le faisaient, qu’est-ce que cela changeait que son amante soit un homme ? Et puis elle était reine, non ? Elle n’allait pas se laisser dicter sa conduite par une bande de dégénérées rendues aigries par des années de combat dans l’ombre. Simplement, il fallait qu’elle fasse attention, à camoufler tant bien que mal son attirance aux yeux de tous, même si le château tout entier pouvait l’entendre pousser des râles de plaisir à une heure avancée de la nuit. Le grand conseil fermait les yeux pour l’instant, comme tous ici, mais à la moindre crise majeure, elle savait qu’elles n’hésiteraient pas à se servir de ça pour se débarrasser d’elle définitivement. Il fallait simplement qu’elle reste sur ses gardes, se dit-elle en se mordant la lèvre inférieure pour retenir le gémissement plaintif qui montait soudainement de sa gorge alors que Frédéric Sirocovitch parachevait son oeuvre en saisissant ses hanches à deux mains tout en accentuant la pression de sa bouche sur son clitoris.
(à suivre...)
Lorsqu’elle entendit le cliquetis du pêne dans la serrure, Tacata Bash se détendit soudainement, soupira, entrouvit légèrement les cuisses pour laisser entrevoir quelques centimètres carrés de peau dont se dégageait une douce odeur de jasmin, et d’une petite flatterie sur la nuque de son compagnon, l’invita à plonger la tête toute entière dans l’échancrure. C’était là encore un de ses rares privilèges royaux, et elle n’était pas prêt de l’abandonner à ses courtisanes, quand bien même elles passaient leurs journées à se languir en glissant à son amant des regards entendus, emplis d’une sauvage concupiscence.Tacata pouvait sentir dans son dos leurs yeux brûlants de cette étrange fièvre, lui transperçant l’omoplate d’une jalousie qu’elles ne cherchaient même plus à contenir, dévorant sur place l’Homme, son homme, avec une voracité sans pareil.Elles pouvaient toujours courir, jamais leurs mains besogneuses d’ouvrières mal dégrossies ne viendront parcourir les lignes parfaites du torse de Frédéric Sirocovitch. Elles n’en auraient jamais l’occasion, et surtout, elles n’en auraient jamais le droit. Dans les heures sombres qui avaient suivi la nuit torride de la Grande Epuration, les Sœurs Constituantes s’étaient juré de ne plus jamais faire commerce de leur charme et de proscrire totalement le plaisir charnel avec tout membre de la caste inférieure. L’immense majorité d’entre eux avaient péris dès les premiers temps de la révolution, et les quelques rescapés qui avaient réussi à s’enfuir dans les montagnes de Gaïa n’avaient eu une espérance de vie que très limitée, mais elles avaient tout de même tenu à faire graver leur serment dans la pierre noble qui ornait la salle du trône, juste au-dessus de la tête de Tacata. A l’époque, elle n’était encore qu’une enfant, une toute jeune pousse de treize printemps que l’on promettait déjà à un grand avenir et à qui l’on avait offert pour son quatorzième anniversaire l’un des derniers représentants de la race maudite, en guise d’animal de compagnie.
Dans les premiers temps, c’est bien ainsi qu’elle le traita. Rien ne l’amusait plus que de lui arracher à pleine main des touffes de cheveux entières, et de fouetter ses mollets vigoureux avec une brassée de joncs jusqu’à ce qu’il saigne abondamment, s’amusant de le voir lécher ses blessures dans un coin de la pièce, s’esclaffant de rire à chaque fois qu’il tentait de détaller sur quelques mètres avant que la lourde chaîne qu’il portait autour du cou ne le rejette violemment en arrière comme un fétu de paille. Et puis, elle s’était lassé de ses jeux d’enfants, le voir courir après une balle ne l’amusait plus autant, et la cruautés des premiers jours fit place peu à peu à des émois intestinaux dont elle avait mis bien du temps à comprendre l’origine. C’était comme si elle ne pouvait s’empêcher de faire courir ses doigts sur la peau bronzée de l’Homme, comme si elle se blottissait malgré elle entre ses bras musclés pour y chercher un peu de chaleur et de douceur pour contrer la brutalité de son éducation quotidienne, faite de haine et d’autorité. Elle savait bien pourtant qu’il était le mal incarné, l’ennemi intime contre qui s’était battu avec tant de férocité sa mère et ses tantes pour que elle, Tacata Bash, puisse jouir d’une vie plus correcte et radicalement différente de celles que ses ancêtres avaient vécues. Mais quel mal pouvait-il y avoir à laisser Freddy fouiller son intimité de ses doigts habiles et fourrer sa langue à un endroit auquel elle-même n’avaient pas accès. Après tout, toutes les femmes du royaume le faisaient, qu’est-ce que cela changeait que son amante soit un homme ? Et puis elle était reine, non ? Elle n’allait pas se laisser dicter sa conduite par une bande de dégénérées rendues aigries par des années de combat dans l’ombre. Simplement, il fallait qu’elle fasse attention, à camoufler tant bien que mal son attirance aux yeux de tous, même si le château tout entier pouvait l’entendre pousser des râles de plaisir à une heure avancée de la nuit. Le grand conseil fermait les yeux pour l’instant, comme tous ici, mais à la moindre crise majeure, elle savait qu’elles n’hésiteraient pas à se servir de ça pour se débarrasser d’elle définitivement. Il fallait simplement qu’elle reste sur ses gardes, se dit-elle en se mordant la lèvre inférieure pour retenir le gémissement plaintif qui montait soudainement de sa gorge alors que Frédéric Sirocovitch parachevait son oeuvre en saisissant ses hanches à deux mains tout en accentuant la pression de sa bouche sur son clitoris.
(à suivre...)
dimanche 19 juillet 2009
La véritable histoire vraie de Freddy Siroco (1)
Avec des mouvements d’une infinie lenteur, Frédéric Sirocovitch, que tout le monde appelait Freddy Siroco depuis aussi longtemps qu’il s’en souvienne, bien avant la Grande Epuration, bien avant qu’il ne devienne célèbre, avec ces mouvements d’une infinie délicatesse dont toutes les femmes du pays lui enviaient la grâce et l’élégance innée, Frédéric Sirocovitch s’agenouilla aux pieds de sa maîtresse et coula doucement sa tête sur ses genoux jusqu’à ce que le sommet légèrement dégarni de son crâne d’une absolue perfection vienne effleurer sans bruit la main diaphane que ce contact fit tressaillir.
Sans cesser de fixer droit devant elle un point invisible qui devait approximativement se situer entre une tenture du XXIIe siècle et une large fenêtre entrouverte sur un paysage champêtre riant et ensoleillé, Tacata Bash vint poser en douceur trois doigts agiles sur les tempes vibrantes de l’homme abandonné béatement à ses pieds. Distraitement, elle caressa quelques instants les restes de ce qui furent autrefois, en des temps reculés dont la simple évocation faisait passer des frissons d’effroi dans l’échine de toutes les jeunes filles du royaume, une chevelure soyeuse et flamboyante qui faisait courir une lueur de gourmandise dans la prunelle des yeux écarquillés de chaque femme qui se retournait sur son passage pour admirer ensuite son fessier délicieusement musclé en passant rapidement leurs langues avides sur leurs lèvres trop longtemps privées d’un tel festin charnel. Il était plutôt de petite taille, mais magnifiquement proportionné, le buste droit et volontaire, les bras courts et suffisamment noueux pour entourer sauvagement les épaules fragiles de ses compagnes en usant de cet infime mélange de fermeté et de douceur avec lequel la plus enivrante et la plus chaude des couvertures polaires ne pourrait jamais rivaliser, les jambes suffisamment puissantes et musclées pour donner l’impression qu’elles pourraient parcourir le monde sans relâche tant qu’elles n’auraient pas trouvée sur leurs routes la paire de jambes avec laquelle elles pourraient continuer leur chemin, avec laquelle elles pourraient s’entremêler à l’ombre rafraîchissante d’un arbre centenaire aux ramures apaisantes. Tacata Bash laissa errer quelques instants son esprit au milieu des champs de blé qui s’étendaient devant elle à perte de vue, lui fit rapidement parcourir la côte sauvage et escarpée où venaient s’écraser dans une mélopée fracassante les vagues mugissantes de la Grande Mer dont les embruns délicats venaient agréablement chatouiller ses narines princières, lui fit se glisser à nouveau dans le château par une porte dérobée , gravir quatre à quatre les escaliers en colimaçons pour revenir se poser avec souplesse sur les tempes grisonnantes de son amant. Malgré les ravages du temps, Freddy Siroco avait conservé un visage d’une éclatante beauté, garni d’une fine barbe blonde, rehaussé de deux pommettes saillantes que surmontait une paire d’yeux pétillants, d’une troublante profondeur. Freddy Siroco était beau, Freddy Siroco était drôle, intelligent, attentionné, Freddy Siroco était son homme, et surtout, Freddy Siroco était le dernier homme vivant à la surface de la planète.
(à suivre...)
Sans cesser de fixer droit devant elle un point invisible qui devait approximativement se situer entre une tenture du XXIIe siècle et une large fenêtre entrouverte sur un paysage champêtre riant et ensoleillé, Tacata Bash vint poser en douceur trois doigts agiles sur les tempes vibrantes de l’homme abandonné béatement à ses pieds. Distraitement, elle caressa quelques instants les restes de ce qui furent autrefois, en des temps reculés dont la simple évocation faisait passer des frissons d’effroi dans l’échine de toutes les jeunes filles du royaume, une chevelure soyeuse et flamboyante qui faisait courir une lueur de gourmandise dans la prunelle des yeux écarquillés de chaque femme qui se retournait sur son passage pour admirer ensuite son fessier délicieusement musclé en passant rapidement leurs langues avides sur leurs lèvres trop longtemps privées d’un tel festin charnel. Il était plutôt de petite taille, mais magnifiquement proportionné, le buste droit et volontaire, les bras courts et suffisamment noueux pour entourer sauvagement les épaules fragiles de ses compagnes en usant de cet infime mélange de fermeté et de douceur avec lequel la plus enivrante et la plus chaude des couvertures polaires ne pourrait jamais rivaliser, les jambes suffisamment puissantes et musclées pour donner l’impression qu’elles pourraient parcourir le monde sans relâche tant qu’elles n’auraient pas trouvée sur leurs routes la paire de jambes avec laquelle elles pourraient continuer leur chemin, avec laquelle elles pourraient s’entremêler à l’ombre rafraîchissante d’un arbre centenaire aux ramures apaisantes. Tacata Bash laissa errer quelques instants son esprit au milieu des champs de blé qui s’étendaient devant elle à perte de vue, lui fit rapidement parcourir la côte sauvage et escarpée où venaient s’écraser dans une mélopée fracassante les vagues mugissantes de la Grande Mer dont les embruns délicats venaient agréablement chatouiller ses narines princières, lui fit se glisser à nouveau dans le château par une porte dérobée , gravir quatre à quatre les escaliers en colimaçons pour revenir se poser avec souplesse sur les tempes grisonnantes de son amant. Malgré les ravages du temps, Freddy Siroco avait conservé un visage d’une éclatante beauté, garni d’une fine barbe blonde, rehaussé de deux pommettes saillantes que surmontait une paire d’yeux pétillants, d’une troublante profondeur. Freddy Siroco était beau, Freddy Siroco était drôle, intelligent, attentionné, Freddy Siroco était son homme, et surtout, Freddy Siroco était le dernier homme vivant à la surface de la planète.
(à suivre...)
Définition Impromptue : l’enterrement
Le mot enterrement vient du grec « enteron », qui signifie « intestin », et du hongrois « ement », qui signifie cancer. Pour autant, la proportion de hongrois qui meurent de l’intestin s’avère ridiculement petite à côté de la proportion de grecs qui meurent du cancer. Pouvons-nous y voir un lien direct avec le fait que la plupart des Grecs soient pédés comme des phoques? Non, car d’une part parce le cancer s’attrape par la cigarette et pas par l’activité sodomite, et d’autre part parce qu'il y a très peu de phoques dans le Péloponnèse, même s’il y a beaucoup de Grecs qui s’appellent Hélène, alors que ma belle-mère s’appelle Patricia, mais c’est une autre histoire, je vous en prie, suivez, un peu.
Enterrement. Si l’on croit le Petit Larousse, qui nous est ici d’une aide précieuse alors que le Petit Robert attend toujours sa maman à l’entrée du magasin, l’enterrement est l’action d’enterrer un mort. Ce n’est pas faux. En vérité, pour que l’inhumation soit moins inhumaine, il vaut mieux que le sujet mis en terre soit déjà mort, ne serait-ce que pour ménager son amour-propre. C’est plus correct, même si cela doit entraîner d’interminables discussions entre les spécialistes de la question alors qu’il existe un moyen très simple de dépister à coup sûr la cessation d’activité vitale : selon le sexe du mort, agitez devant ses yeux vitreux, au choix, un poster de Monica Belluci ou une carte bancaire avec crédit illimité. Réponse instinctive assurée.
On a le tort de croire, à tort ou à raison, mais j’ai toutes les raisons de penser que les gens ont le tort de croire avoir raison à ce sujet, que l’enterrement est un moment très triste. En effet, on peut enterrer beaucoup de choses avec le sourire : sa vie de garçon, ses mauvais souvenirs, sa belle-mère. Et si le mot enterrement ne fait généralement pas aussi rire que le mot lapsus dans ces soirées mondaines toujours aussi réussies grâce aux Ferrero Rochers et à la robe échancrée de madame l’ambassadrice, il prête tout de même à beaucoup de théories fumeuses aussi drôles que passionnantes.
Si le prêtre décidait de prononcer une floraison printanière au lieu de déclamer une banale oraison funèbre tout en sodomisant les enfants de choeur dans la sacristie, ne serait-ce pas beaucoup plus gai ? Si le défunt est mort dans un accident de train, peut-on parler alors de funédérailles ? Est-ce qu’un croque-mort a le droit d’être à côté de ses pompes le jour de l’enterrement, et surtout, a-t-il le droit d’aller s’envoyer un croque-monsieur à la cafet juste après l’office ?
Tout cela ne vous ferez pas rire autant si vous connaissiez mieux l’histoire du nain hongrois Valéry Minipouckz, attraction principale du Grand Cirque de Budapest pendant plus de 20 ans du haut de ses 1m12, et qui s’éteignit malencontreusement un jour pluvieux de gastro-entérite en tombant dans la cuvette des toilettes de son collègue, le géant Russe Valéry Atlas. Il fut mis en terre dans la plus stricte inimitée un après-midi ensoleillé de juillet. C’était un nain très gentil, mais on lui refusa une cérémonie publique et un enterrement en grande pompe pour ne pas gêner les puissants qui restèrent à l’écart bien droits dans leurs bottes militaires pointure 44.
Enterrement. Si l’on croit le Petit Larousse, qui nous est ici d’une aide précieuse alors que le Petit Robert attend toujours sa maman à l’entrée du magasin, l’enterrement est l’action d’enterrer un mort. Ce n’est pas faux. En vérité, pour que l’inhumation soit moins inhumaine, il vaut mieux que le sujet mis en terre soit déjà mort, ne serait-ce que pour ménager son amour-propre. C’est plus correct, même si cela doit entraîner d’interminables discussions entre les spécialistes de la question alors qu’il existe un moyen très simple de dépister à coup sûr la cessation d’activité vitale : selon le sexe du mort, agitez devant ses yeux vitreux, au choix, un poster de Monica Belluci ou une carte bancaire avec crédit illimité. Réponse instinctive assurée.
On a le tort de croire, à tort ou à raison, mais j’ai toutes les raisons de penser que les gens ont le tort de croire avoir raison à ce sujet, que l’enterrement est un moment très triste. En effet, on peut enterrer beaucoup de choses avec le sourire : sa vie de garçon, ses mauvais souvenirs, sa belle-mère. Et si le mot enterrement ne fait généralement pas aussi rire que le mot lapsus dans ces soirées mondaines toujours aussi réussies grâce aux Ferrero Rochers et à la robe échancrée de madame l’ambassadrice, il prête tout de même à beaucoup de théories fumeuses aussi drôles que passionnantes.
Si le prêtre décidait de prononcer une floraison printanière au lieu de déclamer une banale oraison funèbre tout en sodomisant les enfants de choeur dans la sacristie, ne serait-ce pas beaucoup plus gai ? Si le défunt est mort dans un accident de train, peut-on parler alors de funédérailles ? Est-ce qu’un croque-mort a le droit d’être à côté de ses pompes le jour de l’enterrement, et surtout, a-t-il le droit d’aller s’envoyer un croque-monsieur à la cafet juste après l’office ?
Tout cela ne vous ferez pas rire autant si vous connaissiez mieux l’histoire du nain hongrois Valéry Minipouckz, attraction principale du Grand Cirque de Budapest pendant plus de 20 ans du haut de ses 1m12, et qui s’éteignit malencontreusement un jour pluvieux de gastro-entérite en tombant dans la cuvette des toilettes de son collègue, le géant Russe Valéry Atlas. Il fut mis en terre dans la plus stricte inimitée un après-midi ensoleillé de juillet. C’était un nain très gentil, mais on lui refusa une cérémonie publique et un enterrement en grande pompe pour ne pas gêner les puissants qui restèrent à l’écart bien droits dans leurs bottes militaires pointure 44.
dimanche 12 juillet 2009
Définition Impromptue : le Japonais
Le Japonais est appelé Japonais pour pas que l’on ne le confonde avec le Chinois, qui lui habite en chine. Comme quoi, la géopolitique peut parfois être une science exacte et amusante.
Le Japonais, lui, habite donc au Japon, un petit pays de 125 millions d’habitants, et comme disait l’autre, plus on est de fous, moins y’a de riz. Le Japon est composé de 4 îles, les désormais célèbres Honshu, Hokkaido, Honolulu et Fuckyoukoua. Le Japon est un pays qui vit en quasi-autarcie, replié sur lui-même et donc à l’abri des épidémies. Il est d’ailleurs à noter qu’il n’y a jamais eu de vaches folles au Japon. Et même si c’était le cas, soyons sérieux, une vache japonaise suicidaire ne peut pas pour autant être qualifiée arbitrairement de vache hara-kiri.
La capitale du Japon est Tokyo, qui signifie …pas grand-chose en japonais, alors qu’Hiroshima signifie « mets la moi profonde », d’où le titre du fameux livre de Marguerite Duras, « Hiroshima mon amour ». Bizarrement, je vous sens dubitatif, mais vous n’êtes pas sans savoir que le japonais est une langue assez surprenante. Entre parenthèse, je précise à l’intention des jeunes et des imbéciles que « dubitatif » n’est pas un mot vulgaire, au contraire de «démocratie» et d'«éthique». Ainsi, par exemple, le Japonais s’écrit de droite à gauche à l’aide d’idéogramme, alors que le Français s’écrit de la gauche vers l’extrême droite à l’aide d’élections présidentielles dont tout le monde se tamponne.
Les Japonais sont des créatifs dans l’âme. Si les chinois ont inventé le boulier, les Japonais ont inventé le compte à rebours, qui se pratique depuis la nuit des temps en égrenant des perles dans un cendrier. On appelle d’ailleurs cette technique le compte Pearl Harbor. Depuis cette invention, lorsque le Japonais est amoureux, son instinct primaire le rattrape, il enlève ses vêtements avec la rapidité d’un samouraï au galop, et chevauche d’un seul bond la Japonaise en hurlant « Bonzaï ». Des études poussées sur la question ont montré que ce genre de comportements était nippon ni mauvais pour la natalité.
On peut en conclure très hardiment que les Japonais sont des gens impulsifs. Il est vrai que sous leurs dehors assez bourrus, les Japonais sont finalement des gens très heureux avec un humour assez débridé. Je vous vois rire, mais vous riez jaune. Quant à moi, j’arrête immédiatement ces japoniaiseries, j’ai bien trop peur de me faire saké.
Le Japonais, lui, habite donc au Japon, un petit pays de 125 millions d’habitants, et comme disait l’autre, plus on est de fous, moins y’a de riz. Le Japon est composé de 4 îles, les désormais célèbres Honshu, Hokkaido, Honolulu et Fuckyoukoua. Le Japon est un pays qui vit en quasi-autarcie, replié sur lui-même et donc à l’abri des épidémies. Il est d’ailleurs à noter qu’il n’y a jamais eu de vaches folles au Japon. Et même si c’était le cas, soyons sérieux, une vache japonaise suicidaire ne peut pas pour autant être qualifiée arbitrairement de vache hara-kiri.
La capitale du Japon est Tokyo, qui signifie …pas grand-chose en japonais, alors qu’Hiroshima signifie « mets la moi profonde », d’où le titre du fameux livre de Marguerite Duras, « Hiroshima mon amour ». Bizarrement, je vous sens dubitatif, mais vous n’êtes pas sans savoir que le japonais est une langue assez surprenante. Entre parenthèse, je précise à l’intention des jeunes et des imbéciles que « dubitatif » n’est pas un mot vulgaire, au contraire de «démocratie» et d'«éthique». Ainsi, par exemple, le Japonais s’écrit de droite à gauche à l’aide d’idéogramme, alors que le Français s’écrit de la gauche vers l’extrême droite à l’aide d’élections présidentielles dont tout le monde se tamponne.
Les Japonais sont des créatifs dans l’âme. Si les chinois ont inventé le boulier, les Japonais ont inventé le compte à rebours, qui se pratique depuis la nuit des temps en égrenant des perles dans un cendrier. On appelle d’ailleurs cette technique le compte Pearl Harbor. Depuis cette invention, lorsque le Japonais est amoureux, son instinct primaire le rattrape, il enlève ses vêtements avec la rapidité d’un samouraï au galop, et chevauche d’un seul bond la Japonaise en hurlant « Bonzaï ». Des études poussées sur la question ont montré que ce genre de comportements était nippon ni mauvais pour la natalité.
On peut en conclure très hardiment que les Japonais sont des gens impulsifs. Il est vrai que sous leurs dehors assez bourrus, les Japonais sont finalement des gens très heureux avec un humour assez débridé. Je vous vois rire, mais vous riez jaune. Quant à moi, j’arrête immédiatement ces japoniaiseries, j’ai bien trop peur de me faire saké.
La véritable histoire vraie d'Archibald Houdini (2)
Au loin, un cri perçant déchira soudain la nuit et vint percuter de plein fouet le cortex cérébral d’Archibald Houdini, sa colonne vertébrale vibrant tout entière sous l’impact de la plainte sourde dont il pouvait ressentir sans peine toute la sanglante vérité. Ce n’était pas un bruit délibéré, aucun homme ne pouvait volontairement produire un tel gargouillis empli d’une telle souffrance. C’était un râle abscons, un cri d’une rare impureté physique, un mélange indéfinissable et pourtant si évident de confusion mentale et de regrets enfouis.
Archibald tressaillit et s’appuya de nouveau contre le mur pour ne pas tomber lui-même dans le gouffre de ses propres angoisses. Il ne supportait plus d’entendre cette éructation sans nom surgir du fond de la nuit, toujours à la même heure, modulée sur ces trois notes morbides qui faisaient battre son coeur à tout rompre et glisser de grosses gouttes de sueur indélébile le long de son front moite, une note pour chacun des membres de sa famille que ce malheureux avait tué froidement d’une balle de 22 Long Riffle avant de retourner l’arme contre lui avec un succès beaucoup moins probant. Tout le monde connaissait son histoire ici, on l’appelait « la guigne » ou « le guignol », selon que le récit de ses exploits, chuchotés à travers les murs épais de la prison, réveillait plus d’horreur que de pitié au fond de votre coeur. A lui, Archibald Houdini, il évoquait une peur tenace, celle de pouvoir basculer un jour sans peine dans une telle folie autodestructrice, sans garde-fou pour s’empêcher de commettre l’irréparable, sans branchages auxquels se raccrocher au dernier moment. Archibald se redressa légèrement, mit ses deux mains sur ses genoux pour les empêcher de trembler, et extirpa de la poche arrière de son pantalon un mouchoir déjà humide dont il s’épongea consciencieusement le front en soupirant. Cette fois, c’était certain, il ne pourrait plus fermer l’oeil de la nuit. Il ne lui restait plus qu’à faire ce à quoi il était destiné, attendre, attendre encore et encore, écouter les mille bruits dont frissonnait le grand baraquement central, rester aux aguets, les mains crispées le long du corps, et attendre, attendre toujours qu’il se passe enfin quelque chose tout en sachant pertinemment que demain ressemblerait à aujourd’hui comme deux gouttes d’eau. Et que son supplice continuerait encore et encore, Sisyphe des temps modernes qui ne trimballerait rien de plus sur ses frêles épaules que le poids mort de sa propre inconsistance. Un bien lourd fardeau, en vérité, à côté duquel sa claustrophobie latente et ses crises d’insomnies aigues n’étaient que peu de choses. Et pourtant, il en avait belle tripotée dans son casier, de ces phobies déroutantes qui le laissaient sans défense, plus inadapté que n’importe qui encore à la vie dans ce genre d’endroit clôt où tout n’était que souffrances contenues, douleurs enfouies et regrets éternels. Il ne supportait plus les longs moments de solitude, et cette douloureuse impression d’être abandonné à lui-même au milieu des fauves. Il n’en pouvait plus des bagarres de clan et des luttes de pouvoir, des suicides à répétition et des morts suspectes dans les douches, de la loi du plus fort et des coups de couteau dans le bide pour un coin de cour au soleil. Non vraiment, il n’avait pas mérité tout ça. Il était loin d’être le pire des salauds et le plus con de tous, alors pourquoi lui ? Le destin ? Une belle connerie. Alors pourquoi ? Avec précaution, Archibald s’approcha de l’étroite fenêtre par laquelle filtrait doucement la lumière de la lune, comme si celle-ci pourrait un jour avoir la possibilité de lui apporter des réponses sur sa déchéance. Mais la lune n’y pouvait rien, il n’avait qu’à s’en prendre à lui-même. C’était bel et bien sa faute s’il n’avait jamais réussi à s’accrocher aux bonnes branches sa vie entière, chutant de plus en plus lourdement de la cime vers les étages inférieurs, dégringolant comme un pantin désarticulé tout en bas de l’échelle sociale, en se prenant la moitié des barreaux dans la gueule au passage. Et bim.
Le grincement sinistre d’une grille dont on violait brutalement l’entrée et la lumière aveuglante de la torche que lui braquait dans les yeux un blanc-bec d’une vingtaine d’années le sortit soudain de sa métaphore. On l’appelait au téléphone, et il n’avait pas intérêt à glandouiller en route. Archibald grogna faiblement et emprunta la passerelle B sans un regard pour le jeune plancton dont il sentait sur sa nuque les yeux arrogants, suintant d’un profond dégoût. En quelques secondes, il fut devant l’immense masse noirâtre du téléphone mural qui le fixait d’un air mauvais, le combiné jeté négligemment sur son épaule. Archibald s’en saisit avec précaution, jeta un regard suspicieux autour de lui et émit un grognement pour signifier sa présence. Il écouta quelques secondes, sans prononcer un mot, le flot de paroles qui se déversait du combiné tel un torrent d’insanités. C’était sa femme, l’air déjà passablement éméchée, qui l’appelait uniquement pour qu’il pense à lui prendre une bouteille de vodka à l’épicerie de nuit lorsqu’il se déciderait enfin à finir son service et à ramener sa pauvre carcasse de débile profond par ici. Archibald Houdini raccrocha rapidement sans écouter la fin de la conversation, fit tourner lentement entre ses doigts maladroits sa lourde casquette cerclée de fer, la balança d’un geste résigné sur le bureau du chef de garde et se dirigea d’un pas lourd vers la sortie du bâtiment principal, sans un regard pour ses collègues de l’équipe de nuit qui arrivait en sens inverse. Comme tous les autres soirs, il quittait son travail et rentrait chez lui. D’une prison à une autre.
Archibald tressaillit et s’appuya de nouveau contre le mur pour ne pas tomber lui-même dans le gouffre de ses propres angoisses. Il ne supportait plus d’entendre cette éructation sans nom surgir du fond de la nuit, toujours à la même heure, modulée sur ces trois notes morbides qui faisaient battre son coeur à tout rompre et glisser de grosses gouttes de sueur indélébile le long de son front moite, une note pour chacun des membres de sa famille que ce malheureux avait tué froidement d’une balle de 22 Long Riffle avant de retourner l’arme contre lui avec un succès beaucoup moins probant. Tout le monde connaissait son histoire ici, on l’appelait « la guigne » ou « le guignol », selon que le récit de ses exploits, chuchotés à travers les murs épais de la prison, réveillait plus d’horreur que de pitié au fond de votre coeur. A lui, Archibald Houdini, il évoquait une peur tenace, celle de pouvoir basculer un jour sans peine dans une telle folie autodestructrice, sans garde-fou pour s’empêcher de commettre l’irréparable, sans branchages auxquels se raccrocher au dernier moment. Archibald se redressa légèrement, mit ses deux mains sur ses genoux pour les empêcher de trembler, et extirpa de la poche arrière de son pantalon un mouchoir déjà humide dont il s’épongea consciencieusement le front en soupirant. Cette fois, c’était certain, il ne pourrait plus fermer l’oeil de la nuit. Il ne lui restait plus qu’à faire ce à quoi il était destiné, attendre, attendre encore et encore, écouter les mille bruits dont frissonnait le grand baraquement central, rester aux aguets, les mains crispées le long du corps, et attendre, attendre toujours qu’il se passe enfin quelque chose tout en sachant pertinemment que demain ressemblerait à aujourd’hui comme deux gouttes d’eau. Et que son supplice continuerait encore et encore, Sisyphe des temps modernes qui ne trimballerait rien de plus sur ses frêles épaules que le poids mort de sa propre inconsistance. Un bien lourd fardeau, en vérité, à côté duquel sa claustrophobie latente et ses crises d’insomnies aigues n’étaient que peu de choses. Et pourtant, il en avait belle tripotée dans son casier, de ces phobies déroutantes qui le laissaient sans défense, plus inadapté que n’importe qui encore à la vie dans ce genre d’endroit clôt où tout n’était que souffrances contenues, douleurs enfouies et regrets éternels. Il ne supportait plus les longs moments de solitude, et cette douloureuse impression d’être abandonné à lui-même au milieu des fauves. Il n’en pouvait plus des bagarres de clan et des luttes de pouvoir, des suicides à répétition et des morts suspectes dans les douches, de la loi du plus fort et des coups de couteau dans le bide pour un coin de cour au soleil. Non vraiment, il n’avait pas mérité tout ça. Il était loin d’être le pire des salauds et le plus con de tous, alors pourquoi lui ? Le destin ? Une belle connerie. Alors pourquoi ? Avec précaution, Archibald s’approcha de l’étroite fenêtre par laquelle filtrait doucement la lumière de la lune, comme si celle-ci pourrait un jour avoir la possibilité de lui apporter des réponses sur sa déchéance. Mais la lune n’y pouvait rien, il n’avait qu’à s’en prendre à lui-même. C’était bel et bien sa faute s’il n’avait jamais réussi à s’accrocher aux bonnes branches sa vie entière, chutant de plus en plus lourdement de la cime vers les étages inférieurs, dégringolant comme un pantin désarticulé tout en bas de l’échelle sociale, en se prenant la moitié des barreaux dans la gueule au passage. Et bim.
Le grincement sinistre d’une grille dont on violait brutalement l’entrée et la lumière aveuglante de la torche que lui braquait dans les yeux un blanc-bec d’une vingtaine d’années le sortit soudain de sa métaphore. On l’appelait au téléphone, et il n’avait pas intérêt à glandouiller en route. Archibald grogna faiblement et emprunta la passerelle B sans un regard pour le jeune plancton dont il sentait sur sa nuque les yeux arrogants, suintant d’un profond dégoût. En quelques secondes, il fut devant l’immense masse noirâtre du téléphone mural qui le fixait d’un air mauvais, le combiné jeté négligemment sur son épaule. Archibald s’en saisit avec précaution, jeta un regard suspicieux autour de lui et émit un grognement pour signifier sa présence. Il écouta quelques secondes, sans prononcer un mot, le flot de paroles qui se déversait du combiné tel un torrent d’insanités. C’était sa femme, l’air déjà passablement éméchée, qui l’appelait uniquement pour qu’il pense à lui prendre une bouteille de vodka à l’épicerie de nuit lorsqu’il se déciderait enfin à finir son service et à ramener sa pauvre carcasse de débile profond par ici. Archibald Houdini raccrocha rapidement sans écouter la fin de la conversation, fit tourner lentement entre ses doigts maladroits sa lourde casquette cerclée de fer, la balança d’un geste résigné sur le bureau du chef de garde et se dirigea d’un pas lourd vers la sortie du bâtiment principal, sans un regard pour ses collègues de l’équipe de nuit qui arrivait en sens inverse. Comme tous les autres soirs, il quittait son travail et rentrait chez lui. D’une prison à une autre.
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