mercredi 4 novembre 2009

Dictionnaire Impromptu : Stanley Kubrick


Pur produit de la société juive new-yorkaise du début du XXe siècle, à une époque où il valait mieux être de ce côté-ci de l’Atlantique quand on portait la guirlande et les tresses, Stanley Kubrick n’eut pourtant jamais à subir l’antisémitisme primaire dans sa plus tendre enfance. De toute façon, il n’y avait pas d’antisémites dans le Bronx en 1940, ou en tout cas, il y avait dans le Bronx de 1940 beaucoup moins d’antisémite que de sales juifs aux doigts crochus prêts à égorger vos femmes et vos enfants dès que vous aviez le dos tourné.


Né dans le Bronx en 1928, donc, le petit Stanley veut devenir batteur de jazz pour jouer avec son papa pianiste et sa maman chanteuse, mais il change d’avis subitement lorsque son père lui offre un appareil photo pour son treizième anniversaire, retournant sa veste avec l’agilité d’un juif au galop. Stanley Kubrick vend son premier cliché au magazine Look à l’âge de 16 ans, son premier faux autographe de star à l’âge de 17 et son âme au diable à 18 ans, lorsqu’il épouse sa camarade de classe Toba Metz, où il ne va jamais puisqu’il est juif.


Il lui faudra attendre de divorcer pour avoir le temps de réaliser son premier film en 1954, Fear&Desire, où un groupe de soldats est chargé d’éliminer une unité ennemie dans une guerre fictive. Trop intello. Qu’à cela ne tienne, Kubrick épouse sa seconde femme et termine vite fait son second film, le Baiser du Tueur. Après avoir tourné en 1957 son premier carton hollywoodien, les Sentiers de la Gloire, à partir d’un scénario dont personne ne voulait à part Kirk Douglas, l’homme des péplums improbables (note pour plus tard : revoir encore une fois Hercule contre les Martiens avant de mourir), Kubrick garde le rythme, redivorce et épouse dans la foulée l’actrice Christiane Harlan. Les Sentiers de la Gloire le conduisent tout droit à Holywood, mais Kubrick préfère passer par les chemins de traverse et réalise Spartacus, avec, fatalement, Kirk « Jupette » Douglas. Tout émoustillé par le spectacle réjouissant des fiers gladiateurs aux corps badigeonnés d’huile, Kubrick ne peut s’empêcher de commettre en 1962 le brûlant Lolita, adapté du roman de Nabokov, puis le beaucoup moins sensuel Docteur Folamour en 1964, film catastrophe où la bombe est avant tout nucléaire.


Le grand tournant viendra véritablement pour Kubrick en 1965, lorsqu’il le lance dans le long tournage (5 ans) de ce qui sera son chef d’œuvre, 2001 Odyssée de l’Espace, pour lequel il reçoit d’ailleurs l’unique Oscar de sa carrière, celui… des meilleurs effets spéciaux. Affligeant lorsque l’on pense au nombre de Hot D’Or obtenus successivement par Tabata Cash, qui elle aussi a reçu quelques Oscar dans sa carrière, entre deux Julien et trois ou quatre Philippe.

La suite, c’est Orange Mécanique en 1972, monument cinématographique sur fond de 9eme symphonie de Beethoven, et ça, heureusement, même Tabata Cash n’a jamais osé. Kubrick est au sommet, il veut faire un film sur son idole Napoléon mais la Warner le lâche et il commet plutôt Barry Lindon, film en costume pour névrosés abonnés à Télérama, à faire passer la Gloire de mon Père pour un Chuck Norris. Kubrick se rattrape heureusement très vite avec l’immense Shining , film d’horreur psychologique porté à bout de bras par le non moins immense et très hitchcockien Jack Nicholson. Que faire de mieux après ça ? Kubrick revient à ses premiers amours, le film de guerre, avec le très bon Full Metal Jacket et sa fameuse affiche du fusil coiffé d’un casque « Born To Kill ». Ce ne sera malheureusement pas le dernier Kubrick, puisque celui-ci se lance sept ans après dans le gigantesque projet Eyes Wide Shut, dont il aura la chance de ne jamais voir la sortie en salle : Kubrick meurt d’une crise cardiaque le 7 mars 1999, sans doute écoeuré par la performance de moule neurasthénique de Tom Cruise, beaucoup moins convaincant que la poignée de porte dans la scène d’entrée.

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