dimanche 24 mai 2009

Définition Impromptue : le Ténia

Le ténia, du latin « tenia », qui signifie à peu près la même chose mais en plus romain, est aussi appelé ver solitaire par ceux pour qui l’apprentissage du latin n’a jamais pu dépasser, malgré une obstination louable, le cap des deux gamins tentant de traire avec conviction une louve au lieu de se taper une chèvre comme le faisait ardemment monsieur Seguin dans ses montagnes lointaines où pète pourtant avec conviction le grizzly brun sans déranger ses voisins, méééééé, méééééé, y’a pas de mais.

Le ténia est un parasite qui s’installe dans l’intestin pour y picorer à son aise les réserves d’énergie de l’honnête homme qui maigrit alors à vu d’œil. Malgré cela, le ténia réussit encore et toujours à échapper à la vindicte populaire qui n’hésite pourtant pas pendant ce temps à fusiller en masse les chômeurs et les jeunes pour les mêmes raisons, tout en indiquant de leur main libre à la maréchaussée le squat des sans papiers à virer manu militari, in peto et illico presto, comme quoi, le latin, c’est comme le vélo et les seins de Monica Belluci, ça ne s’oublie pas.

En effet, il s’avère plus difficile de déloger un ténia que des sans papiers ou qu’une armée de cambodgiens installés dans des caves insalubres à fabriquer des chemises dès l’âge de 5 ans alors que chez nous, il y a encore des mômes de 13 ans qui ne savent pas faire démarrer une voiture en utilisant les fils sous le volant. C’est lamentable. Éduquez vos gosses, bordel. En fait, c’est même impossible de déloger un ténia sans utiliser la manière forte : lorsqu’il s’est installé et peut profiter à son aise de vous sans vous rendre de compte, il ne vous reste plus qu’à prendre un bon avocat et à priez pour votre salut.

En ce sens, le ténia est plus proche de la femme que l’on peut le croire à première vue.

Pour faire encore plus simple, à l’intention des jeunes et des imbéciles, disons que la femme est encore aujourd’hui la forme de ténia la plus dangereuse pour l’homme, et que c’est pour cela qu’il la troque si souvent contre un petit verre en solitaire.

La véritable histoire vraie d’Harry Lee Oswald (2)

Au moment même où il se relevait pour vérifier qu’il n’y avait plus autour de lui que des cadavres sans éclat, Harry Lee Oswald se figea soudainement. Pendant de longues secondes, il ne bougea pas d’un pouce, paralysé sur place, le pistolet encore fumant à la main droite, comme si ce qu’il venait de faire lui avait demandé une telle dose d’énergie qu’il lui fallait prendre quelques minutes de repos, même contre son gré.

Pause. Il était crispé, à moitié relevé sur ses genoux, de grosses gouttes de sueur glissant malicieusement le long de son front sans qu’il ne puisse même esquisser un geste pour les éponger avant qu’elles ne s’écrasent sur le sol de l’entrepôt avec un petit scintillement délicat. Pause. Ca commençait à être long, et surtout, ce n’était pas la première fois que ça lui arrivait, ce genre de blocage intempestif. Il devrait peut-être penser à consulter un médecin, tant qu’il était encore temps. Ca faisait longtemps qu’il s’était fait à l’idée qu’il ne vivrait pas bien vieux, le genre de métier qu’il exerçait n’était pas exactement de ceux qui vous assuraient une retraite tranquille après des années de labeurs consciencieux et sans risques derrière un bureau. Rester toute sa vie derrière un bureau à regarder défiler sa vie devant ses yeux, ça l’aurait sans doute tué depuis bien plus longtemps et bien plus sûrement que tous les canons sciés du monde. Mais ce n’était pas parce qu’il préférait vivre dangereusement qu’il ne faisait pas gaffe à sa santé. Il avait beau se considérer lui-même comme un des plus beaux salopards que la planète ait porté, il n’empêchait que c’était sa peau dont il s’agissait, et qu’il y tenait un minimum. Il fallait qu’il arrête de tirer sur la corde en permanence, comme il le faisait. Une fois, déjà, il était mort. Il avait vu le tunnel, la lumière, les angelots avec les trompettes et tout le bordel, et puis il était revenu, il s’était senti aspiré par les pieds à travers un immense tourbillon et s’était retrouvé nez à nez avec le médecin qui venait d’extraire une balle de 22 de sa poitrine et de lui faire un massage cardiaque pour le ramener dans le monde réel. Même s’il avait été obligé de le tuer ensuite, Harry Lee Oswald lui serait éternellement reconnaissant pour ce qu’il avait fait, et en la mémoire de ce pauvre témoin innocent, il se devait de faire un peu plus attention à sa santé dorénavant. A force d’user des vies, il allait bien finir par y passer... allez, c’était décidé, dès que tout ça se serait un peu calmé, il irait se faire un check-up complet chez un docteur peu regardant sur l’identité de ses patients.

Doucement, avec d’infinies précautions, il tenta de remuer le petit doigt pour assurer sa prise sur le pistolet qui commençait à glisser insensiblement le long de sa cuisse, mais sans plus de résultat. Ca devenait vraiment très inquiétant, ses moments de paralysies subites qui pouvaient le surprendre n’importe quand. Pour l’instant, il s’en était plutôt bien tiré à chaque fois, mais ça lui faisait froid dans le dos rien qu’à imaginer que cela aurait pu lui arriver une trentaine de minutes auparavant, alors qu’il tentait de fuir ses poursuivants en sautant de toit en toit au-dessus des rues de Dallas. Il s’imaginait, s’immobilisant en plein vol avant de chuter lourdement et de s’écraser lamentablement sur le bitume en contrebas. Il frissonna, et comme s’il était soudainement parcouru d’une décharge, son corps se mit en mouvement et il faillit perdre l’équilibre. Il jura copieusement en se remettant d’aplomb. Cochonnerie. Il ne couperait décidément pas à sa visite chez le médecin, mais pour l’instant, il y avait plus urgent. Il fallait qu’il se tire d’ici, et vite. Les mecs qu’il venait de descendre n’étaient sûrement pas venu seuls pour le cueillir, et dans pas longtemps, tout le coin allait grouiller de racailles et de flics mélangés... Harry Lee Oswald n’aimait ni l’un ni l’autre, il leur vouait la même haine viscérale depuis que les seconds essayaient de lui coller sur le dos un assassinat que les premiers avaient commis. La seule certitude qu’il pouvait avoir à cette heure, c’est que pas un seul d’entre eux n’hésiteraient à lui coller une balle dans la tête à la moindre occasion pour l’empêcher d’aller raconter son histoire à la ronde. Un bruit de sirène au loin lui fit tendre l’oreille, et il se hâta de fouiller rapidement les poches de ses agresseurs pour voir si elle contenait quelques éléments susceptibles de l’innocenter, sait-on jamais. Le plus petit avait dans son portefeuille une photo de lui de très mauvaise qualité, prise au téléobjectif, où on le voyait très clairement épauler un fusil à lunettes Remington avec un air gourmand. Tu parles d’un indice à la con. Pas hyper convaincant comme preuve de son innocence. Harry Lee Oswald soupira et fit tout de même glisser la bandoulière de son sac pour y glisser la photo. Il en vida le contenu sur le sol devant lui, effleurant du doigt chaque item de sa maigre collection : un couteau suisse émoussé, une boussole à la con, une carte de Dallas à moitié déchiré, trois chargeurs de pistolets, une alliance qu’il caressa rêveusement et un kit de premiers secours qu’il avait eu l’intelligence de piquer dans cet appartement où il s’était réfugié juste après l’attentat. Autrement dit, que dalle. A part cette carte postale du Machu Picchu qu’il tourna et retourna entre ses doigts sans parvenir à déchiffrer l’étrange inscription cabalistique qu’elle portait au dos, une suite de signes sans signification apparente, suivi de coordonnées géographiques abracadabrantes. Il soupira à nouveau et eut un sourire désabusé. C’était pas le Pérou, mais c’était la seule piste qu’il avait jusqu’à maintenant. Va pour le Machu Picchu. Il se releva, contempla quelques secondes le corps flasque de la journaliste qui s’était arrêté de saigner abondamment, puis s’approcha des deux malabars étendus et s’agenouilla pour leur subtiliser leurs armes. Ca pouvait toujours servir, vu ce qui l’attendait dehors. Alors qu’il se relevait en empochant le petit calibre du grand dadais, une sorte de clochette tinta à son oreille, et Harry Lee Oswald jeta autour de lui un regard inquiet. Rien. Ca aussi, ce n’était pas la première fois que ça lui arrivait, il entendait des bruits qui ne semblaient exister que dans son imagination. Et merde. Il était bon pour une visite chez le psy en plus de son escapade chez le médecin. Harry Lee Oswald haussa les épaules, secoua la tête pour chasser le tintement dans ses oreilles, embrassa une dernière fois le délicieux tableau ensanglanté qu’il laissait derrière lui, consulta sa montre à quartz d’un regard inquiet et s’enfonça d’un pas résolu dans le couloir qui s’ouvrait sur sa droite.

(à suivre...)

dimanche 17 mai 2009

La véritable histoire vraie d’Harry Lee Oswald (1)

- « Vous préférez que la première balle soit pour vous ou que je la bute d’abord ?
- C’est une vraie question ?
- Vous avez raison, simple rhétorique ».

L’homme sourit d’un air mauvais et soupira comme si cela ne l’enchantait pas tant que ça de faire son job. Il leva doucement son arme et abattit tranquillement la jeune femme agenouillée de deux balles dans la tête. Harry Lee Oswald ne broncha pas lorsque les deux flops rapprochés se répercutèrent avec force sur les murs défraîchis de l’immense entrepôt désaffecté où ils étaient retenus prisonniers depuis deux bonnes heures. Le corps flasque de la jeune journaliste s’effondra à ses pieds avec un bruit sourd, et Harry eut un petit mouvement de recul sur ses genoux pour éviter que la flaque de sang qui s’écoulait de son crâne ne vienne tâcher son costume en alpaga flambant neuf. Cette petite pute l’avait assez fait chier comme ça, il ne manquerait plus qu’il en soit de sa poche pour un pressing. S’il ne l’avait pas eu dans les pattes alors qu’il tentait d’échapper à ses poursuivants, il ne serait pas ligoté comme un con sur une chaise en métal dont les montants lui sciaient littéralement le dos. L’autre guignol pointait maintenant sur lui son automatique en le toisant d’un air goguenard, poussant négligemment du pied le cadavre encore fumant pour le faire rouler sur le côté. Il n’avait pas l’air si surpris de l’absence totale de réaction d’Harry lorsqu’il avait abattu la jeune fille et devait savoir depuis longtemps qu’il était un professionnel bien loin de pouvoir être impressionné par une manœuvre aussi grossière. Il devait donc aussi savoir qu’il ne serait pas si facile de le faire parler, et Harry le soupçonnait d’avoir buté la gonzesse qui l’accompagnait par pur sadisme. Il jeta un regard rapide à la chevelure blonde constellée de tâches de sang et se remémora avec un sourire aux lèvres l’odeur fugace du parfum bon marché dont elle aimait s’affubler à chacun de leurs rendez-vous. Il se pinça les lèvres. Ca l’embêtait tout de même qu’elle soit morte, maintenant. Il ne tenait pas tant que ça à elle et elle ne lui était pas d’une grande aide, mais ses statistiques allaient en souffrir et ça ne ferait pas du bien à son image de marque. Il soupira et adressa un rictus désabusé à l’homme qui lui faisait face. Rapidement, il évalua le poids de son adversaire et jaugea qu’il aurait certainement le dessus en cas de combat au corps à corps. Bien sûr, pour ça, il faudrait qu’il parvienne déjà à se libérer de ses liens, mais il avait déjà sérieusement entamé la corde en la frottant doucement contre les rebords tranchants de sa chaise. Quant aux deux rigolos qui montaient la garde à ses côtés, ils avaient l’air bien trop occupés à mater les seins blanchâtres qui s’échappaient abondamment du chemisier tâché de sang pour lui poser des difficultés.

La crosse du pistolet automatique le cueillit soudainement au menton et il faillit perdre l’équilibre de sa chaise, surpris par la virulence du coup. L’enfoiré savait ce qu’il faisait. Harry se demanda de quel bord il pouvait bien être. KGB ? Mossad ? Il avait cru déceler un accent prononcé des Balkans quand il lui avait adressé la parole la première fois, mais ça pouvait tout aussi bien être un leurre. En tout cas, c’était un professionnel, et il finirait très certainement par apprendre tout ce qu’il voulait savoir si seulement Harry avait la moindre idée de ce qu’il lui demandait. Il hésita une seconde, lécha goulûment le sang qui perlait de sa lèvre ouverte et se fendit d’un large sourire, comme si tout cela n’était qu’une vaste blague entre potes et que l’homme en pardessus marron allait le détacher d’un moment à l’autre avec une petite tape dans le dos. Le second coup le fit vaciller plus sérieusement, et il du rassembler toutes ses forces pour ne pas s’évanouir. Il cligna des yeux à plusieurs reprises pour chasser les petites lumières qui dansaient la sarabande dans son crâne endolori, s’humecta les lèvres à nouveau et, d’une voix qu’il espérait parfaitement assurée, complimenta son agresseur sur la qualité du tissu dont il s’était vêtu. Cela eut exactement l’effet escompté, l’autre parti d’un large fou rire et baissa sa garde une fraction de seconde, soit dix fois plus de temps qu’il n’était nécessaire à Harry Lee Oswald pour faire céder ses liens d’une poussée et se projeter tête la première dans le buffet de son adversaire, qui s’écroula en poussant un petit gémissement. Avant qu’il ne put se remettre debout, Harry lui brisa net la nuque entre son avant-bras et sa poitrine, et se saisit rapidement de l’arme tombée au sol. Une expression de désarroi profond se peignit un instant sur le visage du plus grand des deux gardes, et il battit l’air de manière extrêmement comique lorsqu’une balle vint le frapper entre les deux yeux et désintégra le seul neurone qui occupait l’espace libre entre ses oreilles. Ebahi, le deuxième larron regarda bouche bée son collègue s’effondrer au sol, lâcha bruyamment son AK47 et préféra fermer les yeux plutôt que de voir ce qui allait suivre. Sa dernière pensée fut qu’il se serait bien tapé la petite pute avant de la buter et de se prendre une balle dans l’abdomen.

(à suivre...)

Définition impromptue : la frigidité

La frigidité. Bien. Le mot « frigide » vient du latin frigo, qui signifie « froid », et du grec « rigide », qui peut signifier beaucoup de choses lorsque l’on n’a pas entendu venir un grec dans son dos. A ce propos, je voudrais rétablir une vérité profonde : le père et la mère de Nana Mouskouri sont grecs, ce qui laisseraient à penser que les grecs ne sont pas tous pédés. Pas tous. Mais enfin, si on l’habitude d’aller se faire mettre chez les grecs, personne jusqu’ici ne s’est encore entendu proposer d’aller se faire enculer chez les phoques, ce qui est d’ailleurs un tort vu les capacités érectiles exceptionnelles du phoque mâle de taille normale, capable de s’enchaîner trois de ses comparses et deux petites phoquettes pour le dessert sans même battre des nageoires, mais enfin bon ce n’est pas la question, qu’est-ce que je raconte.

J’en ai entendu une à droite qui se murmurait pour elle-même « c’est vrai ! ». Mademoiselle, vous pouvez vous replonger dans vos délicieux souvenirs d’amours zoophiles, vous n’êtes a priori pas concerné par cette définition. Et rien que pour vous, je raconterais un autre jour l’histoire formidable et pleine de rebondissements de ce phoque d’origine grec et pas manchot pour un sou, qui écrivait en morse des messages codés à un pingouin albanais enfermé dans une prison canadienne pour vol d’esquimaux et recel de bâtons. Mais pour l’instant, revenons à nos moutonnes.

Bref. La frigidité. Si je me lance dans un tel sujet, c’est que je connais personnellement une amie de mes connaissances qui est tellement hermétique aux joies simples de l’hétérosexualité, que quand je lui dis « bande », elle pense velcro. Après avoir entretenu pendant longtemps avec cette personne une relation aussi passionnée et sulfureuse qu’un dimanche après-midi chez Drucker, je me suis fait un devoir de comprendre le véritable sens de ce mot. C’est pourquoi je me dois de faire une nouvelle fois appel au Petit Larousse, qui nous est d’une aide précieuse alors que le Petit Robert a été vu pour la dernière fois à l’entrée de la caverne aux phoques du zoo de Vincennes où on l’a aperçu pénétrer avec trois grecs patibulaires mais presque.

Si l’on en croit le Petit Larousse, la frigidité est l’absence de plaisir sexuel. Faux, hurlerais-je avec rage sur scène, je n’ai que mépris pour cette explication galvaudée et légèrement graveleuse qui ne fait que transmettre aux générations futures des préceptes d’un autre âge auxquels nous ne devrions pas plus prêter attention qu’aux sous-vêtements peu affriolants de notre partenaire de jeux sous couette douillette, sauf évidemment dans l’hypothèse scientifique assez rare mais plus controversé du string léopard pour homme. Faux. La frigidité, vous en conviendrez, est l’absence d’appétit sexuel, une sorte d’anorexie du coït, tenterais-je d’expliquer délicatement à ces délicieuses Kate Moss du plumard qui nous entoure de toute l’aridité de leurs envies contrariées et contrariantes. D’ailleurs, le contraire de la frigidité s’appelle la nymphomanie, dont je pourrais malheureusement vous donner autant d’exemple que pour le sujet qui nous intéresse aujourd’hui, mais que nous développerons un autre jour, juste après les phoques, le sida et les mycoses pubiennes. Concentrez-vous, un petit peu.

La frigidité a été inventée par Madame de Coubertin, qui en avait très vite fait une de ces grandes spécialités conjugales. C’est même par dépit que le baron Pierre de Coubertin se lanca à corps perdu dans la rénovation des jeux olympiques, lui qui ne pouvait plus se lancer dans aucun autre corps sans ressentir immédiatement l’immense solitude du coureur de fond. D’ailleurs, sa devise orne encore les statuts du Comité Olympique, rappelez-vous, messieurs, l’important, c’est de participer.

Depuis ce jour, une immense majorité de la gente féminine a fait de la frigidité une véritable discipline olympique : dix minutes par jour en apnée, maîtrise complète du moindre bruit suspect, maintien total des muscles en position fermée, dispositions naturelles au sourire détaché et au regard dans le vide, l’entraînement quotidien de ces recordwomen de l’abstinence a de quoi faire froid dans le dos, si ce n’est pas ailleurs. A ma connaissance, la femme est d’ailleurs la seule espèce animale capable de regarder la télé et de faire l’amour en même temps, alors que nous-même, pauvre homme abruti de houblon et de football, nous sommes déjà bien en peine de marcher et de parler en même temps sans nous casser la gueule et tomber dans le ridicule.

La science attend toujours une explication rationnelle à ce phénomène mystérieux qui confine presque au surnaturel. On se demande encore souvent pourquoi les relations sexuelles des femmes frigides sont aussi peu intenses. Et bien, j’ai la réponse. C’est bien simple, tout le monde vous le dira, et mesdemoiselles, vous serez d’accord avec moi : l’homme pense très souvent avec sa queue. Jusqu’à là, nous sommes d’accord. Et bien voilà. Pendant que l’homme pense avec sa bite, la femme, elle, baise avec son cerveau. C’est vous dire le niveau d’inactivité.

vendredi 8 mai 2009

Définition : La Suisse

La Suisse est un petit pays d’Europe centrale coincée entre le Zimbabwe et le Lichtenschtein., dont les habitants sont appelés assez logiquement les Suisses, avec cette rigueur cartésienne propre à ses ex-collaborateurs nazis rompus depuis bien longtemps aux joies de l’épuration ethnique sans bavure. Méfiez-vous tout de même, il y a un piège : le Suisse se fait aussi parfois appeler Helvète, ce qui est déjà une belle preuve, s’il en était besoin, que les Suisses sont de sacrés faux-culs.

Ayant toujours été à l’abri de la guerre, le Suisse entretient conjointement une extraordinaire phobie d’une catastrophe nucléaire et une passion sans précédent pour les abris: ainsi, depuis plusieurs années, l’helvète creuse des abris anti-atomiques dans le Mont Saint Cervin pour s’y enterrer en sécurité : c’est très amusant, car quand le Suisse est sous terre, on peut aussi l’appeler l’helvète underground.

Pour finir avec la partie géographie, Il est à noter que la capitale de la Suisse est Bern, alors que le capital de Stéphane Bern est en Suisse. Marrant, non? Ah ben non. Mais vous avez raison, il ya tout de même bien plus intéressant, quand on voyage, on préfère en apprendre plus sur la population que sur de vagues considératons technico-géographiques : par exemple, on se fout bien de savoir quelle est la capitale de l’Espagne, tout ce qui nous intéresse, c’est que les espagnols sont des gens ombrageux avec un tout petit cul pour éviter les coups de cornes, ce qui nous intéresse, c’est que ce sont des mecs qui passent leur temps à foutre des aiguilles à tricoter dans le cul des vaches en hurlant “olé” pour se donner du courage. Et bien, pour les suisses, c’est pareil.

Les légendes ont la vie dure, mais certaines légendes sont moins légendaires que d’autres : s’il y a encore une chance pour que le yeti et sa yetillette n’existent pas, si la plupart d’entre vous ont du mal à croire en l’existence d’un triangle des Bermudas où disparaissent chaque année une demi-douzaine de millions de shorts et de pantacourts, en revanche, personne n’oseraie contester le fait que le Suisse est plutôt…. … … … … … … lent. Ceux qui ont déjà tenté de parcourir les autoroutes suisses à une vitesse normale le savent bien : il semblerait que les voitures suisse ne soient construites en série qu’avec trois vitesses différentes : lent, très lent, et pas trop lent mais bon quand même on ne va pas se presser.

Une autre légende assez vérifiable sur la question : les Suisses sont les champions du monde de la neutralité et ne prennent jamais parti pour qui que ce soit. Si l’on devait prendre un exemple au hasard, il paraîtrait que les Suisses catholiques ont toujours refusé de prendre position sur le préservatif, mais ce n’est pas ce que m’a raconté le Petit Robert, qui a connu de très près la prise de position des curés suisses sur la question. J’en profite pour rappeller que Coluche avait bien tort de dire que la Suisse était un pays si propre qu’on ne pouvait y attraper aucune maladie, seulement des médicaments. C’est faux, le Petit Robert y a aussi attrapé le SIDA, qui ne semble décidément plus être réservé aux homosexuels, aux drogués, aux noirs, aux juifs et aux , alors ou va t’on, je vous le demande. Mais là n’est pas la question: le suisse est neutre, et le suisse est donc indécis. D’ailleurs, selon des récents sondages, la population suisse est très précisément composée de 35% de suisses allemands, 40% de suisses français, 20% de suisses romanches et tout de même 5% sans opinion.

Il existe donc quatre sortes de Suisse : le suisse romanche, qui parle romanche, le Suisse français, qui parle le français lentement, le suisse italien, qui parle italien avec les mains, et le suisse allemand, qui parle une langue sans aucune voyelle. Ah, les Suisses allemands, quelle passion! Une espèce bien à part dans l’histoire suisse : si le reste du pays est aussi neutre et sans saveur qu’un yaourt light Taillefine, le Suisse allemand a lui toujours rêvé d’être envahi par l’Allemagne, alors que la Suisse allemande, elle, a toujours rêvé d’être envahie par Arnold Scwharteneger. Moi-même, bien que n’étant pas exagérément germanophobes, quand je reçois des Suisses à la maison, je mets les Suisses français dans la chambre d’amis et les Suisses allemands dans la chambre d’ennemi. Mais je ne voudrais pas embêter plus longtemps les suisses germanophones avec leurs coutumes et leur accent à couper au couteau. Suisse, bien sûr.

La véritable histoire vraie de Martin Luther Queen (3)

Au fur et à mesure qu’il se rapprochait du Centre d’Embauche, Martin Luther Queen avait de plus en plus de mal à se frayer un chemin à travers la foule qui grossissait par vagues entières. Tu parles d’un meeting, voilà qui était digne des plus populaires des Gouvernants du monde. Il joua des coudes pour atteindre la porte de service du bâtiment, priant pour ne pas être trop en retard. Il ne voulait pas perdre son emploi, pas maintenant.

Heureusement, son patron avait d’autres chats à fouetter, trois de ses collègues s’étaient fait portés pâles ce matin, et il le renvoya sur le terrain sans même lui adresser un regard, lui désignant négligemment du revers de la main le nouveau avec qui il allait faire équipe aujourd’hui et qu’il devait former de son mieux. Martin Luther Queen le remercia humblement de sa confiance, empoigna le guidon de l’énorme benne fluorescente dans laquelle il déversait quotidiennement toutes les ordures de la ville, et se tourna vers acolyte d’un jour. C’était un petit blanc aux cheveux coupés très courts, apparemment très nerveux, qui ne cessait de se moucher avec le revers de sa manche en le regardant d’un air torve. Quand Martin voulut lui serrer la main avec un grand sourire pour lui souhaiter la bienvenue dans l’équipe, il eut un bref mouvement de recul, comme s’il avait peur de se brûler à son contact, puis consentit à lui tendre une main molle, d’une moiteur insensée. Martin Luther Queen ne se formalisa pas plus que ça de son attitude étrange. Les barjots étaient nombreux dans le métier, on n’engageait pas des diplômés de grandes écoles pour aller nettoyer la merde des autres. Il haussa les épaules et se dirigea vers la sortie sans attendre. L’autre sembla hésiter, trépignant sur place, puis trottina à sa poursuite et revint à sa hauteur au moment où ils débouchaient au grand jour. D’une voix mal assurée, il lui demanda timidement s’il pourrait s’occuper de pousser le truc pendant qu’il tournait le machin, et Martin accepta avec un grand sourire. S’il n’y avait que ça pour le mettre dans le bain. Il lui laissa les commandes et s’écarta pour le regarder manœuvrer dans l’allée de service, une lueur de fierté dans l’oeil. Il s’arrêta subitement avec un air affolé, et repartit à toutes allures vers les ateliers en criant à Martin par-dessus son épaule qu’il avait oublié un truc à l’intérieur. Un truc. Ce mec avait vraisemblablement un vocabulaire à base de choses et de trucs, ça n’allait pas être facile pour faire la conversation. Enfin, tant qu’il faisait sa part de boulot, ça ne le dérangeait pas. Il avait connu pire, des véritables psychopathes qui juraient toute la journée et agressaient les passants sans raisons, des dépressifs qui se lamentaient et traînaient leur benne à ordure comme si elle contenait tout le poids de leur vie de merde. Celui-là avait l’air encore à part. Un gentil paumé de plus. Martin haussa les épaules, sortit une cigarette de son paquet, l’alluma en protégeant une allumette à l’intérieur de sa main, et commença à avancer le long du sentier en ramassant de sa pique des papiers gras tombés dans la pelouse. Il fallait tout de même qu’ils se dépêchent, où ils allaient retomber en plein dans le cortège qu’il voyait se mouvoir lentement au loin. Il était presque arrivé sur la place principale lorsque son collègue le rejoint, l’air toujours aussi nerveux, jetant autour de lui des petits regards apeurés, telle une bête traquée. Martin avisa le nom inscrit sur la petite plaque métallique qu’il portait de travers sur la poitrine. Harry Lee Oswald, pas commun comme nom, et pas facile à caser en si peu de place, mais ce n’était pas pire que son propre patronyme. Il sourit à Oswald d’un air engageant, comme pour le rassurer, et lui indiqua du doigt les emplacements à dégager en priorité avant que la foule ne s’amène par ici. C’était déjà le cas, des dizaines de personnes commençaient à se masser de part et d’autres de la terrasse principale du Grand Hotel Continental, braillant et applaudissant à tout rompre. Martin contempla quelques instants le spectacle saisissant de la marée humaine qui se déversait vers lui, puis se mit au travail en sifflotant, regroupant les détritus en de petits tas qu’Oswald, sur ses talons, venait ensuite aspirer avec sa machine de guerre. Ils avaient presque fait le tour de la place lorsqu’ils furent forcés de faire halte, tant la masse de gens autour d’eux leur interdisait tout déplacement supplémentaire. Martin haussa de nouveau les épaules, sortit une autre cigarette de son paquet et s’adossa à la benne pour observer l’arrivée au balcon de celui qu’ils appelaient tous de leurs vœux, le grand, le beau, le charismatique Ronald Bush. Leur sauveur, leur nouveau messie, et le nouveau cauchemar des Gouvernants, sans aucun doute. Martin n’en revenait pas de voir une telle ferveur populaire. Il avait beau trouver ce type détestable et ses idées absolument grotesques, il ne pouvait s’empêcher d’admirer sa prestance et ses talents de rassembleur. Il apparut enfin sur la terrasse, et le signe de main qu’il adressa à la foule suffit à déclencher une clameur sourde qui fit vibrer tout le sol sur des kilomètres. C’est vrai qu’il avait une certaine classe, et Martin, subjugué, ne pouvait détacher ses yeux de sa silhouette. Il ferait un bon gouvernant, après tout. Peut-être que toutes ses théories raciales, ce n’était que de la provocation, pas de quoi s’enflammer. Et puis, il était noir, et ça, c’était un atout non négligeable dans la course au pouvoir. Martin Luther Queen regarda autour de lui, et s’aperçut que la foule était presque entièrement composée de noirs bien habillés qui le toisaient d’un air méprisant, lui, le petit blanc des quartiers pauvres vêtu de sa tenue de balayeur. Il se recula prudemment à l’abri de la benne, tentant de disparaître un peu à la vue de tous. Ce n’était pas le moment de se faire remarquer. Les blancs avaient mis tant de temps à regagner quelques droits et libertés fondamentales, toute provocation était inutile. On lui avait inculqué ça depuis qu’il était tout petit, il n’était qu’un blanc, un blanc dans un monde de noirs, et il devait apprendre à rester à sa place.

Martin Luther Queen n’osait même plus regarder le pasteur Bush qui haranguait désormais la foule, debout sur la balustrade du balcon. Il ne le vit pas non plus basculer dans le vide, touché à la tête par un coup de fusil dont il entendit la détonation lui déchirer les tympans comme si on venait de lui tirer dessus. Il ne comprit pas tout de suite ce qu’il faisait à plat ventre derrière la benne à ordure, et il mit un temps infini à s’apercevoir que le bout de bois qu’il venait de ramasser par terre n’était autre qu’un fusil à canon court, encore fumant. Il n’eut même pas besoin de tourner la tête pour savoir qu’Harry Lee Oswald avait disparu depuis bien longtemps. Et quand il vit fondre sur lui six hommes de la division Norton, le pistolet au poing, il ne prit même pas la peine d’obéir à leurs ordres et se remit debout en tenant son arme par le canon. Eux ne prendraient certainement pas le risque d’un procès et avaient très visiblement l’ordre de tirer à vue. Marthin Luther Queen serra l’arme fumante contre sa poitrine, leva les yeux au ciel et attendit le coup fatal. Tant pis pour son rêve.

dimanche 3 mai 2009

Théorie foireuse : John Fitzgerald Kennedy

Nous vivons décidément une époque moderne et formidable, et alors que l’actualité internationale bat son plein, la question essentielle qui semble turlupiner des générations entières des honnêtes travailleurs blancs qui survivent à moins de 10.000 km du conflit israélo-palestinien, cette question semble rester encore et toujours de savoir qui a tué John Fitzgerald Kennedy.

Mais je vous le demande en votre âme et conscience, enfin, pour ceux qui en ont une (restez, mademoiselle, maintenant que vous êtes là), je vous le demande, et en même temps votre avis je m’en fous mais je vous l’ai déjà dit il y a 5 minutes, juste avant de me perdre en conjectures incroyables et de m’interrompre moi-même entre deux virgules, et si tu avances quand je recule, comment veux-tu, comment veux-tu que je virgule correctement ? Bref, je m’égare, et pas seulement du Nord : je vous le demande, messieurs dames, français, françaises, américains, américaines, esquimaux, esquimettes, qu’est ce que ça peut bien vous foutre de savoir qui a tué JFK ?

Quant à moi, je me suis déjà posé la question dans mon for intérieur (car j’ai un for intérieur, moi, avec qui je m’entends d’ailleurs très bien depuis ces vacances exceptionnelles que nous passâmes ensemble à Pornic, main dans la main, yeux dans les yeux et la zigounette dans le pilou-pilou), je me suis donc souvent posé la question, vous disais-je avant d’être interrompu à nouveau entre deux virgules par la personne la plus exceptionnelle que je connaisse, je me suis donc, disais-je, souvent posé la question dans ma Ford Intérieur Cuir modèle 1927, et j’en suis arrivé à la conclusion (Inspirez. Soufflez. Respirez.) que au lieu de se demander sans cesse quel est l’ignoble crétin inconscient qui avait assassiné JFK, on ferait mieux de se demander pourquoi personne n’avait encore jamais tenté d’assassiner Bruce Springsteen ou tout autre de ses collègues du rock FM à la con écrit directement au balais à chiotte par des handicapés congénitaux dont la poésie de fond de poubelle oscille périlleusement entre le bredouille parkinsonien et la vomissure nauséeuse qui sort des commissures des lèvres entrouvertes de leurs fans béats et systématiquement transis d’admiration pour tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la merde, que Dieu me tripote et que Desproges me pardonne. Mais là n’est pas la question, et l’on va encore me dire que je m’égare, et pas seulement de Montparnasse. La vraie question n’est pas de savoir qui a tué JFK, mais pourquoi ?

Je me suis d’abord imaginé que tout ça était un coup de Toyota qui craignait de voir les Lincoln Continental s’exporter sur tout le marché américain après être devenu la voiture officielle du président Kennedy, mais c’est ma Ford Intérieur qui m’a soufflé la solution et je préfère ne pas lui faire confiance sur ce coup-là, pardonne moi, mon amour, nous retournerons manger des crêpes à Pornic dès que j’aurais un moment à moi, promis.

La deuxième solution m’apparut alors la plus évidente : j’ai bien sûr pensé à un fan éploré de Marilyn Monroe qui voyait d’un très mauvais œil sa blonde se rapprocher un petit peu trop du président des Etats-Unis : je rappelle à l’intention des jeunes et des imbéciles qui nous regardent que Marilyn Monroe était cette actrice aux jambes félines qui couchaient allégrement avec JFK en pensant rentrer dans l’histoire, alors que c’était l’histoire qui lui rentrait dedans.Ça ne tient pas debout non plus, est-ce qu’un désaxé à tenter de tuer Bill Clinton après ses révélations sur l’affaire Levinski ? Mais…peut-on vraiment comparer Monica Levinski et Marilyn Monroe ? Réponse : un esquimau.

La véritable histoire vraie de Martin Luther Queen (2)

Le froid se faisait plus intense à chaque fois. Martin Luther Queen remonta encore le col de sa veste et décida de couper par le parc pour achever sa promenade nocturne. Il y faisait encore plus sombre qu’ailleurs, et peu osaient s’aventurer par ici à cette heure-ci, mais Martin ne craignait pas grand chose. Il était trop pauvre pour que l’on puisse songer un instant à lui voler quelque chose qui ait de la valeur, et avec cette capuche qui recouvrait presque entièrement son visage, ne laissant dépasser que ses deux yeux perçants, il apparaissait assez menaçant pour décourager d’éventuels agresseurs.

A l’entrée du parc, un frère de couleur adossé contre un pilier lui adressa un léger signe de la main, trois doigts levés en l’air, la paume de la main tournée vers l’intérieur, puis porta ses doigts à la bouche et poussa deux sifflements brefs qui déchirèrent la nuit. Martin sursauta et lui rendit son salut en maugréant, le W un peu moins franc que celui du guetteur. Il n’avait jamais été très porté sur ces histoires de frères de sang, de confréries raciales et de signes de ralliement. Comme si l’on avait besoin de ça. Certes, ensemble, ils étaient plus forts, mais Martin n’avait pas forcément la même conception d’ensemble que la plupart de ses « frangins ». La vie était déjà bien assez difficile pour que l’on ait besoin de créer sans cesse de nouveaux ghettos au milieu du ghetto, et il ne voyait surtout pas très bien ce que sa couleur de peau venait faire là-dedans, en quoi cela le rendait plus respectable aux yeux du guetteur de la porte sud. Des pauvres, il y en avait des blancs, des noirs, des métis, et même des asiatiques (les rares qui n’avaient pas été exterminés pendant la Grande Transformation), mais rien ne les différenciait dans leur façon de vivre. Martin Luther Queen avait fait un rêve. Un rêve où l’on parvenait à remplacer la lutte des races par la lutte des classes, un rêve où les noirs et les blancs vivraient comme des frères et des sœurs et non de perpétuels ennemis reniflant les faiblesses de leurs adversaires. Il savait que ce n’était certainement qu’un rêve, mais il espérait tant pouvoir monter dans le même autobus qu’eux et pisser dans leurs toilettes sans craindre de se faire tabasser par quelques policiers. C’était arrivé quelques semaines plus tôt à ce pauvre Rodney Queen, un petit gars pas méchant qui avait eu la mauvaise idée de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, et surtout de ne pas être de la bonne couleur de peau. Ca le foutait en rogne rien que d’y penser, et il pressa encore le pas pour rentrer se calmer dans son petit appartement miteux où il faisait si bon rêver. A deux reprises, il crut entendre des pas derrière lui et pivota rapidement sur lui-même, sans distinguer quoi que ce soit dans la nuit noire qui refermait ses serres sur lui. Ca faisait déjà quelques jours qu’il avait cette désagréable sensation qu’on le suivait partout où il allait, comme si on épiait ses moindres faits et gestes en attendant qu’il commette une erreur impardonnable. Il y avait surtout cet homme, la peau noire comme l’ébène, une trentaine d’année, toujours vêtu d’un costume sombre, et qu’il avait cru reconnaître à trois reprises dans plusieurs endroits où il ne l’avait jamais vu auparavant. Il secoua la tête et soupira bruyamment, comme pour se rassurer lui-même. Voilà qu’il devenait lui aussi complètement parano. La CIA n’existait plus depuis plus de 200 ans, et voilà qu’il voyait des espions partout en pleine journée. Il y avait bien la police secrète au service des Gouvernants, la tristement célèbre division Norton, mais si la description de son bonhomme correspondait à l’éthique de la boutique, il ne voyait pas très bien ce que les Norton pouvaient avoir à battre d’un minable balayeur dans son genre. Il n’était inscrit à aucune association, ne votait que lorsque c’était nécessaire et toujours dans le sens de la majorité, histoire de ne pas faire de vagues. Aucun antécédent révolutionnaire dans sa famille, pas de casier judiciaire, une vie sans histoire, il était tout sauf une proie intéressante pour eux. Il haussa les épaules, il devait vraiment se faire des idées. Pressant à nouveau le pas, Martin Luther Queen se hâta de regagner son domicile sans se retourner une seule fois, même lorsqu’une poubelle se renversa derrière lui avec un grand fracas. Qu’importe. Il était près de 23h, la fin du monde n’avait vraisemblablement pas eu lieu, et il avait encore une longue journée de travail qui l’attendait.

Le 23 février 2222, à 09 :12 précise, Martin Luther Queen se réveilla en sursaut dans le hamac étroit qui occupait la paroi du fond de son minuscule appartement de Manhattan. Il était en sueur, son coeur battait à tout rompre, et il comprit subitement que c’était le bruissement sourd de la foule au-dehors qui l’avait sorti de son cauchemar. Il se releva à moitié, frotta vigoureusement ses yeux avec la paume de ses mains pour se relever, et se dirigea en titubant vers l’unique fenêtre de la pièce qu’il ouvrit en grand pour aspirer une grande goulée d’air rafraîchissant. Une centaine de personnes de toute origine étaient regroupées au milieu de la rue, certaines arborant le tee-shirt noir où se découpait la silhouette altière de Ronald Bush, d’autres trimballant de grandes pancartes remplis de slogans guerriers. Martin héla un jeune garçon qui passait sous ses fenêtres pour en savoir plus, et ne fut presque pas surpris d’apprendre que le prédicateur organisait dans la matinée un grand rassemblement pour remercier les Puissants d’avoir épargné la population. De là où il était placé, ça ressemblait plus à un meeting politique en bonne et due forme, mais Martin Luther Queen décida de garder ses opinions et ses réflexions stupides pour lui, se contentant de refermer la fenêtre et de se traîner lamentablement vers la salle de bain pour y endosser son costume de travail.

(à suivre)