dimanche 31 janvier 2010

La véritable histoire vraie de Juliette Montaigu (1)

Ça allait être une journée parfaite. Juliette Montaigu caressa distraitement la tignasse en broussaille qui reposait sur son épaule dénudée et se soulevait au rythme d’une respiration apaisée, puis tenta en tirant la langue de se frayer un passage vers le bord du lit sans réveiller le pauvre garçon extenué par les trois orgasmes successifs qu’elle lui avait soutirés ardemment, comme en témoignaient les innombrables sachets de préservatifs éventrés qui jonchaient le parquet de son petit loft bordelais, sa « garçonnière » comme elle l’appelait... d’autres avaient des bonbonnières qu’elles garnissaient prudemment de caramels mous en attendant la rigueur de l’hiver, elle préférait emplir le sien de friandises beaucoup plus goulues et bien montées, même si ce n’était pas forcément la taille qui comptait, et encore, elle pouvait émettre des doutes à ce sujet, pas sûr que son bel étalon trouve autant grâce à ses yeux le jour où il ne serait plus capable de la faire jouir avec tant d’ardeur, à faire tambouriner les voisins sur tout les murs de son appartement, sales rats, vieilles peaux aigries et frustrées, ça allait encore piailler derrière son dos et elle serait obligée de tout nier en bloc, à nouveau, tiens, le café était déjà prêt, voilà ce qu’Il trafiquait dans sa cuisine un peu plus tôt dans la matinée, à l’heure où le soleil cajoleur de ce mois de juillet commençait à peine à darder ses premiers rayons au-dessus de la Garonne rougeoyante dont les reflets ocres dansaient joyeusement devant ses yeux encore à moitié clos, alors qu’elle sirotait son café avec ces petits bruits de chuintement dont il raffolait, et ce tic de gorge si particulier qu’Il était bien le seul à supporter, le commentant même d’un petit gloussement sonore qui émergea soudainement de sous les draps lavandes dont Il était en train d’émerger péniblement, fantôme maladroit qui se transforma soudainement en prince charmant des contes de fées à l’épée flamboyante fièrement tendue vers les cieux, arrachant à Juliette un petit sourire attendri qu’elle se hâta de réprimer en détournant prestement le regard pour ne pas se laisser happer par la vision céleste de son torse puissant et de sa queue soyeuse qui la pénétrait avec ce rythme obsédant dont lui seul semblait connaître la mesure, bing, bang, ding, dong, et voilà que l’horloge de l’Eglise Saint Michel sonnait onze heures tapantes et la fin du marché toute proche, ding, dong, et ses longues mains qui se renfermaient avec aisance sur ses hanches délicates lorsqu’il prenait possession de son corps et rentrait en elle avec une telle force qu’elle devait mordiller le coussin pour ne pas hurler et fermer les yeux pour faire disparaître ces images de sa tête avant d’être tentée de le rejoindre sous la douche, mais voilà qu’il en sortait déjà, heureusement, habillé de frais, le regard coquin et le stylo déjà mordillé à la bouche, cherchant fiévreusement des yeux dans tout l’appartement un morceau de papier sur lequel coucher en vrac toutes les pensées nocturnes qui avaient assaillies son cortex, à s’en retourner dans le lit en balbutiant des suites de mots sans queue ni tête qui faisait sourire Juliette dans son demi-sommeil, alors qu’elle tentait d’imaginer ce que cela pourrait bien donner une fois délicatement mis en ordre avec la verve qu’elle lui connaissait dans ses bons jours.

(à suivre)

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