lundi 1 mars 2010

Dictionnaire impromptu : Lolo Ferrari

1963. Tout le Puy-de-Dôme est en effervescence : Martin Luther King vient d’avoir un rêve, JFK se fait buter, l’AC Milan est champion d’Europe, un volcan millénaire se réveille avec un petit pschitt et Clermont-Ferrand devient soudainement le centre du monde connu le 9 février lorsque naquit, dans la charmante clinique champêtre de Gorge Profonde, la petite Ève Geneviève Aline Vallois.

D’origine plutôt modeste, celle qui ne s’appelle pas encore Lolo Ferrari va vivre une enfance plutôt tranquille du côté de La Gaule, pardon, de La Baule, et se retrouve à faire un peu de mannequinat, après que les premiers temps de l’adolescence aient révélé au monde entier les généreux attributs dont la nature a doté la petite Eve. En effet, dès l’âge de 13 ans, elle trimballe son 90 D sur les plages ensoleillés et fout la Baule aux vicelards qui triquent en terrasse et boivent à la sautée des jolies filles qui passent sur la jetée en chaloupant légèrement pour éviter les bites. D’amarrages. Parmi eux, un certain Eric Vigne, quarantenaire bedonnant surnommé « le cep » par ses amis, qui épouse sans vergogne et sans capote la jeune Eve Vallois par un beau matin de juillet 1988. Sa mère est là, mammaire aussi, les prothèses ne sont pas loin. Folle d’admiration pour Amanda Lear et encouragée par son cep vénéneux, Eve devient Lolo et son tour de poitrine gonfle à une vitesse faramineuse, atteignant 180 cm de bonheur après 25 opérations chirurgicales pendant lesquelles elle en profite pour se faire redessiner les yeux, le nez et les lèvres afin de ressembler au maximum à son idole de jeunesse. Avec 2,8 kilos et trois litres de sérum dans chaque sein, Lolo devient « la femme à la plus grosse poitrine du monde » pour le Guiness Book. Pour le reste de la population, elle restera un monstre de fête foraine faite pour se faire forer, une truie, une salope, et encore, je baise mes mots.

Pourvue de ses brassières faites sur mesure et de ses insomnies chroniques (elle ne peut plus dormir sur le ventre ou sur le dos, et la peur que ses seins explosent subitement lui fait perdre le sommeil), Lolo Ferrari incarne en 1996 une caricature de Pamela Anderson dans le film Camping Cosmos, obtient un rôle régulier dans Eurotrash sur Channel 4, fait du strip-tease dans des cabarets moisis, s’essaie aux films érotiques puis passe carrément au porno, où elle a de nouveau l’occasion de se faire refaire la façade avec une régularité déconcertante. Les philanthropes de Sony Music en profite pour lui faire enregistrer le tube éphémère « Air Bag Génération », mais ça commence déjà à sentir le sapin, d’autres diront la moule ou les sous-bois, pour Lolo Ferrari et son champignon de mari. Et même si elle remporte son procès contre la firme Ferrari, son projet de marque de lingerie Lolo Ferrari Underwear tombe à l’eau et Lolo sombre définitivement dans la dépression qui la guette depuis tant d’années.

Le 5 mars 2000, aussi profonde et expérimentée soit-elle (à ne pas manquer pour les cinéphiles, le somptueux Plein Pot réalisé en 1998 par Marc Dorcel), Lolo voit enfin le bout: elle est retrouvée inanimée à son domicile de Grasse avec assez de médicaments dans l’organisme pour assommer un éléphant nain, et malgré les traces suspectes de strangulation qui entraînèrent l’arrestation de son mari, l’enquête de police conclut finalement à un suicide. Conformément à ses désirs, Lolo Ferrari est enterrée quelques jours plus tard dans la plus stricte inimité, dans un grand cercueil blanc aux impressionnantes mensurations et où fut déposé un exemplaire de sa peluche favorite, Winnie L’ourson. Finir sa carrière comme vibromasseur funèbre pour actrice décadente, c’est moche, même pour un mec qui méritait les flammes de l’enfer depuis ce jour où il attrapa Porcinet dans une clairière sordide de la Forêt des Rêves Bleus pendant que Tigrou et Bourriquet faisaient le guet, mais c’est une autre histoire.

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